- De la bourgeoisie au communisme révolutionnaire
George Grosz fût successivement dessinateur caricaturiste, peintre allemand, puis américain. Né à Berlin en 1893, sa jeunesse se déroulera dans l'Allemagne de Guillaume II. Il poursuit des études artistiques à l'Académie Royale de Dresde, puis à Berlin. Son premier dessin est publié en 1910. Sa haine pour le militarisme prussien et outrancier de l'époque, du nationalisme, du clergé et de la bourgeoisie - dont il est issu - lui serviront de thème pour croquer ses contemporains. Bien qu'il semble manifester une sympathie pour le milieu ouvrier et les chômeurs - ayant renié son milieu et la religion - il est plus attiré par la littérature et sa rébellion intérieure. La 1ère Guerre Mondiale transforme son antimilitarisme en antinationalisme. En 1916, par refus du nationalisme germanique et par amour pour l'Amérique, il transforme son prénom Georg en George et son nom, Gross en Grosz. Il décidera de ne s'exprimer qu'en anglais par provocation.
Dès 1914, bien qu'étant apolitique, il s'engage comme volontaire. Réformé en 1915, pour raisons de santé, il sera réincorporé en 1917 et transféré dans divers centres hospitaliers où il finira la guerre. " Cette époque que j'ai vécue dans le carcan du militarisme était une défense perpétuelle - et je sens que tous les actes que j'accomplissais alors me dégoûtaient du plus profond de moi-même", dira-t-il de cette époque. Les dessins de cette période montrent des champs de bataille avec leurs cortèges de destructions, de morts, d'horreurs. Il ne sera pas le seul à peindre la monstruosité de la vie des tranchées. Les dessins de George Grosz seront proches de ceux d'Otto Dix ou de Max Beckmann.
En 1918, l'union des artistes du Novembergruppe se créé à Berlin, influencée par la révolution d'octobre en Russie. George Grosz y adhère et défend la révolution soviétique. La même année, il devient membre du KPD - le parti communiste allemand. L'écrasement des mouvements spartakistes et des Conseils de Bavière par les sociaux-démocrates, aidés de l'armée et des corps francs, radicalisera davantage ses dessins. Cela lui vaudra de nombreux démêlés avec la justice, pour
Entre-temps, le mouvement Dada naît en 1916 à Zurich, représentant le nihilisme total. Il arrive à Berlin en 1918, et George Grosz sera l'un de ses premiers représentants. C'est au sein de ce mouvement artistique que Grosz poussera la provocation à son paroxysme. Il réalisera avec John Heartfield un photomontage, Dadamerika. George Grosz sera nommé Propagandada lors d'un meeting Dada. En 1920, il organise avec John Heartfield la première Foire Internationale Dada. Cent soixante quatorze œuvres sont présentées. Max Ernst et Otto Dix y exposent leurs œuvres. La galerie sera fermée par la police et condamné à une forte amende.
En 1922, lors d'un séjour en Union Soviétique, où il rencontrera Lénine, George Grosz dresse un bilan désastreux du pays et de ses conditions de vie. Il quittera le parti communiste en 1923, tout en continuant à collaborer à l'organe de presse de celui-ci. Il croque des bourgeois repus et obscènes, des militaires arrogants et vulgaires. En 1926, pour dénoncer la condamnation à mort des deux anarchistes italiens Sacco et Venzetti, George Grosz dessine une statue de la Liberté ensanglantée brandissant une chaise électrique. En 1928, Erwin Piscator met en scène "Les aventures du brave soldat Chvéïk" de Jaroslav Hasek. George Grosz dessine un recueil de dessins, projeté en arrière-scène. Cela lui vaudra une peine de prison de deux mois et 2 000 marks d'amende pour blasphème. On y voyait un Christ crucifié avec un masque à gaz et des bottes militaires. La légende disait "Ferme-la et continue à servir". George Grosz est sans aucun doute l'artiste qui a le mieux pressenti l'arrivée du nazisme en Allemagne. Au cours d'une conversation avec Thomas Mann, George Grosz prédit en 1933 "qu'Hitler ne tiendrait pas six mois, mais six ans ou même dix ans [...]". Il émigre aux États-Unis juste avant l'arrivée des nazis au pouvoir. Il sera le premier à se voir retirer la nationalité allemande et ses œuvres trouveront une place de choix dans l'exposition sur l'art "dégénéré" en 1937.
Son talent de caricaturiste est très apprécié aux États-Unis. Déjà, en 1932, il avait été invité à enseigner à L'Art Students League de New York. Il y restera jusqu'en 1936, puis créera la Sterne-Grosz School. Son admiration pour les États-Unis l'empêchera d'être critique. Son œuvre deviendra plus traditionnelle, plus calme et plus sereine.