- Lettres à sa fille - Calamity Jane - Rivages Poche n°232
Le 1er août 1903 disparaissait la cow girl la plus connue du Far West, Calamity Jane, de son vrai nom Martha Jane Cannary. A sa mort, elle était seule, comme elle l'avait toujours souhaité, aveugle et sans un sou. C'est son unique ami - le révérend Sipes - qui sera auprès d'elle au moment ultime. C'est lui qui conservera la correspondance de Calamity Jane, jamais envoyée à sa fille Jane Hickok, dite Janey. Elle avait confié la garde de son enfant à un couple d'aristocrate britannique, le capitaine James O'Neill, en 1874, se sachant consciente des difficultés matérielles et morales qu'elle aurait pour l'élever correctement, tel que Calamity Jane le voulait.
La première lettre adressée à sa fille date du 25 septembre 1877, jour de ses quatre ans. Dans celle-ci, Calamity Jane se dévoile aimante, maternelle, rongée de remords à l'idée d'avoir dû abandonner son enfant chéri. "Vois-tu, ton papa Jim m'a promis qu'il m'enverrait toujours une lettre chaque année, le jour de ton anniversaire. Comme j'ai été heureuse d'avoir des nouvelles de lui ! Il m'a envoyé ta petite photo : tu es mon portrait craché à ton âge, et en regardant ta petite photo ce soir, je m'arrête pour t'embrasser, et puis, à me souvenir, les larmes viennent et je demande à Dieu de me laisser un jour réparer les torts d'une façon ou d'une autre envers ton père et envers toi". Elle lui parle de la beauté sauvage de son cheval, "Satan", et de la relation singulière qu'elle entretient avec les indiens Sioux, qui la prennent pour une folle tout en la respectant. Calamity Jane lui enverra des photos de ses grands-parents maternels, comme pour ne pas lui faire oublier d'où elle vient, et qu'elles sont ses vraies origines.
Régulièrement, dans ses courriers écrits à la manière d'un journal intime discontinu, Calamity jane raconte son quotidien à sa chère petite Janey. Elle lui parle d'un jeune garçon à peine plus âgé qu'elle - Jackie - dont les parents ont été tués par les Indiens et qu'elle a pris sous sa protection, dont elle prend soin avec toute l'attention dont elle sait faire preuve. Elle lui dit les attaques de diligences, les voyages qu'elle entreprend de Cheyenne à Abilene, des hors-la-loi et de cette bravoure qu'elle possède et qui lui semble la chose la plus naturelle au monde ! Pour sa Janey, Calamity Jane veut devenir une femme blanche présentable, qu'elle soit fière de cette mère atypique et insolite, évoluant dans un milieu d'hommes, où les sentiments sont rares et rudes. Elle veut se montrer devant sa fille en toute dignité, en sachant lire et écrire, en ayant de l'instruction comme elle. "Je prends un livre à la fois et regarde dans le dictionnaire chaque mot dont je ne connais pas le sens. Je n'ai fait que trois ans d'école, et bien que j'aie ces livres à étudier, ce n'est pas une tâche aisée. [...] Tout le monde pense que je ne sais ni lire ni même écrire mon nom ; je les laisse donc le penser".
Au long de ces lettres écrites au gré de ses déplacements, Calamity Jane racontera son existence faite d'errance, de rumeurs malfaisantes, de souffrances psychiques. Elle lui parlera de son vrai et unique père - James Butler Hickok dit "Wild Bill " - rencontré en 1870 à Abilene, Kansas. Elle lui expliquera comment elle l'a sauvé de bandits qui voulaient le tuer ; dans quelles conditions ils se sont réellement mariés, puis séparés afin qu'il épouse Agnès Lake, bien qu'il soit toujours amoureux d'elle. C'est Wild Bill qui donnera à Martha Cannary ce surnom de Calamity Jane. Cette rencontre sera la plus belle de sa vie. Elle en conservera un souvenir émouvant et tendre jusqu'au bout. "Quand il est revenu, après avoir épousé Agnès Lake, je pensais que je le battrais froid, mais un jour, nous nous sommes revus et nous nous sommes tous deux aperçus que nous nous aimions encore l'un l'autre plus que jamais. J'oubliais tout quand j'étais près de lui. Personne d'autre ne l'a jamais su. Si quelqu'un me faisait allusion à cette situation, je m'avançais et lui cassais la figure, et lui aussi le niait. Nous vivions tous les deux une vie de mensonges".
Calamity Jane qui n'hésitera jamais à prendre part à une bagarre générale, à se taper avec des femmes qui veulent lui ôter le droit d'être ce qu'elle est - une femme - sauf qu'elle porte des pantalons d'homme, chevauche la plaine seule d'une ville à l'autre pour servir de messager, conduit les diligences de voyageurs sans crainte. Elle accepte toute sorte de métier pour survivre, gagner sa vie honnêtement selon ses valeurs morales, joue aux cartes avec les hommes dans les saloons et se soûle certains soirs jusqu'à rouler à terre.
Pauvre Calamity Jane serait-on tenté de penser en lisant ces "Lettres à sa fille". Dans ces courriers jamais envoyés à son enfant, elle lui parle de son quotidien dans un milieu humainement et psychologiquement hostile. Elle en profite pour se dévoiler un peu, s'ouvrir, se livrer, se confier à quelqu'un qui ne la jugera pas sur son comportement, qui ne la condamnera pas pour ses actes. Sa fille, c'est son île aux trésors, sa raison de vivre, d'être, d'exister. C'est son moteur, ce qui la fait avancer, continuer et espérer. Elle n'a qu'un désir, la revoir le plus tôt possible, malgré l'océan qui les sépare, pouvoir la serrer dans ses bras, l'embrasser, la câliner. En fait, Calamity Jane culpabilisera toute sa vie d'avoir été obligée de laisser Janey en raison de son existence instable, chaotique et parce qu'elle souhaitait pour sa petite le bonheur d'un vrai foyer où s'épanouir, grandir en paix, apprendre et s'éduquer, jouer, être insouciante et heureuse. Tout ce qu'elle n'a jamais vraiment connu, ou si peu. Grâce à ces "Lettres à sa fille", on part à la rencontre d'une autre Calamity Jane, plus proche de ce qu'elle était sans doute, plus humaine, plus sensible, émouvante et profondément seule dans un univers où rien ni personne ne lui a fait de concession, où tout le monde l'a plus souvent méprisée qu'honorée en raison de sa manière d'être et de ses fréquentations. C'est une Calamity Jane éloignée des clichés qui ont la vie dure, heureuse de pouvoir acheter quelques arpents de terre pour construire une cabane, faire la cuisine et travailler pour Buffalo Bill Cody et son célèbre Wild West Show.
305 - 1 = 304 livres dans ma PAL, malgré les nouveaux achats, prêts, vols ... Étonnant !
La première lettre adressée à sa fille date du 25 septembre 1877, jour de ses quatre ans. Dans celle-ci, Calamity Jane se dévoile aimante, maternelle, rongée de remords à l'idée d'avoir dû abandonner son enfant chéri. "Vois-tu, ton papa Jim m'a promis qu'il m'enverrait toujours une lettre chaque année, le jour de ton anniversaire. Comme j'ai été heureuse d'avoir des nouvelles de lui ! Il m'a envoyé ta petite photo : tu es mon portrait craché à ton âge, et en regardant ta petite photo ce soir, je m'arrête pour t'embrasser, et puis, à me souvenir, les larmes viennent et je demande à Dieu de me laisser un jour réparer les torts d'une façon ou d'une autre envers ton père et envers toi". Elle lui parle de la beauté sauvage de son cheval, "Satan", et de la relation singulière qu'elle entretient avec les indiens Sioux, qui la prennent pour une folle tout en la respectant. Calamity Jane lui enverra des photos de ses grands-parents maternels, comme pour ne pas lui faire oublier d'où elle vient, et qu'elles sont ses vraies origines.
Régulièrement, dans ses courriers écrits à la manière d'un journal intime discontinu, Calamity jane raconte son quotidien à sa chère petite Janey. Elle lui parle d'un jeune garçon à peine plus âgé qu'elle - Jackie - dont les parents ont été tués par les Indiens et qu'elle a pris sous sa protection, dont elle prend soin avec toute l'attention dont elle sait faire preuve. Elle lui dit les attaques de diligences, les voyages qu'elle entreprend de Cheyenne à Abilene, des hors-la-loi et de cette bravoure qu'elle possède et qui lui semble la chose la plus naturelle au monde ! Pour sa Janey, Calamity Jane veut devenir une femme blanche présentable, qu'elle soit fière de cette mère atypique et insolite, évoluant dans un milieu d'hommes, où les sentiments sont rares et rudes. Elle veut se montrer devant sa fille en toute dignité, en sachant lire et écrire, en ayant de l'instruction comme elle. "Je prends un livre à la fois et regarde dans le dictionnaire chaque mot dont je ne connais pas le sens. Je n'ai fait que trois ans d'école, et bien que j'aie ces livres à étudier, ce n'est pas une tâche aisée. [...] Tout le monde pense que je ne sais ni lire ni même écrire mon nom ; je les laisse donc le penser".
Au long de ces lettres écrites au gré de ses déplacements, Calamity Jane racontera son existence faite d'errance, de rumeurs malfaisantes, de souffrances psychiques. Elle lui parlera de son vrai et unique père - James Butler Hickok dit "Wild Bill " - rencontré en 1870 à Abilene, Kansas. Elle lui expliquera comment elle l'a sauvé de bandits qui voulaient le tuer ; dans quelles conditions ils se sont réellement mariés, puis séparés afin qu'il épouse Agnès Lake, bien qu'il soit toujours amoureux d'elle. C'est Wild Bill qui donnera à Martha Cannary ce surnom de Calamity Jane. Cette rencontre sera la plus belle de sa vie. Elle en conservera un souvenir émouvant et tendre jusqu'au bout. "Quand il est revenu, après avoir épousé Agnès Lake, je pensais que je le battrais froid, mais un jour, nous nous sommes revus et nous nous sommes tous deux aperçus que nous nous aimions encore l'un l'autre plus que jamais. J'oubliais tout quand j'étais près de lui. Personne d'autre ne l'a jamais su. Si quelqu'un me faisait allusion à cette situation, je m'avançais et lui cassais la figure, et lui aussi le niait. Nous vivions tous les deux une vie de mensonges".
Calamity Jane qui n'hésitera jamais à prendre part à une bagarre générale, à se taper avec des femmes qui veulent lui ôter le droit d'être ce qu'elle est - une femme - sauf qu'elle porte des pantalons d'homme, chevauche la plaine seule d'une ville à l'autre pour servir de messager, conduit les diligences de voyageurs sans crainte. Elle accepte toute sorte de métier pour survivre, gagner sa vie honnêtement selon ses valeurs morales, joue aux cartes avec les hommes dans les saloons et se soûle certains soirs jusqu'à rouler à terre.
Pauvre Calamity Jane serait-on tenté de penser en lisant ces "Lettres à sa fille". Dans ces courriers jamais envoyés à son enfant, elle lui parle de son quotidien dans un milieu humainement et psychologiquement hostile. Elle en profite pour se dévoiler un peu, s'ouvrir, se livrer, se confier à quelqu'un qui ne la jugera pas sur son comportement, qui ne la condamnera pas pour ses actes. Sa fille, c'est son île aux trésors, sa raison de vivre, d'être, d'exister. C'est son moteur, ce qui la fait avancer, continuer et espérer. Elle n'a qu'un désir, la revoir le plus tôt possible, malgré l'océan qui les sépare, pouvoir la serrer dans ses bras, l'embrasser, la câliner. En fait, Calamity Jane culpabilisera toute sa vie d'avoir été obligée de laisser Janey en raison de son existence instable, chaotique et parce qu'elle souhaitait pour sa petite le bonheur d'un vrai foyer où s'épanouir, grandir en paix, apprendre et s'éduquer, jouer, être insouciante et heureuse. Tout ce qu'elle n'a jamais vraiment connu, ou si peu. Grâce à ces "Lettres à sa fille", on part à la rencontre d'une autre Calamity Jane, plus proche de ce qu'elle était sans doute, plus humaine, plus sensible, émouvante et profondément seule dans un univers où rien ni personne ne lui a fait de concession, où tout le monde l'a plus souvent méprisée qu'honorée en raison de sa manière d'être et de ses fréquentations. C'est une Calamity Jane éloignée des clichés qui ont la vie dure, heureuse de pouvoir acheter quelques arpents de terre pour construire une cabane, faire la cuisine et travailler pour Buffalo Bill Cody et son célèbre Wild West Show.
305 - 1 = 304 livres dans ma PAL, malgré les nouveaux achats, prêts, vols ... Étonnant !
17 commentaires:
J'avais vu ce livre lors de sa sortie mais j'ai cru à un roman et le roman western m'attire peu, j'aurais du être plus curieuse car une correspondance de ce genre est elle très intéressante, j'ignorais tout de cette femme
un billet découverte , merci à toi
Tu confirmes ce que je supputais depuis longtemps : ce livre a tout pour me plaire. Il m'a l'air vraiment passionnant.
J'ai une petite question : dans les extraits que tu cites, la langue est plutôt châtiée. Est-ce fidèle au niveau de langue de Calamity Jane ou est-ce que le texte a été retravaillé pour la publication ?
J'attendais ton billet avec impatience. Et mon attente à été récompenser. Un beau travail !!!
Je vais me procurer ce livre dans les plus brefs délais.
Merci
Je n'en ai lu que des extraits, que j'aime bien d'ailleurs : j'en fais parfois étudier à mes élèves dans le cadre de la découverte de l'épistolaire. Tu me donnes envie de découvrir l'ensemble !
@ Dominique : Je suis comme toi, j'avoue que les romans Western ne sont pas ma tasse de thé ! Mais ce très court recueil de lettres est très intéressant, car elle permet de connaître un tout petit peu mieux Calamity Jane ... Et elle mérite cette attention !
@ In Cold Blog : Je pense que ce petit livre te plaira certainement. Il se lit très vite et on découvre la vie à l'époque du Far West ... Pour le langage châtié, c'est parce que j'ai choisi des extraits corrects ! D'autres passages sont plus crus et plus verts. Le style est parfois maladroit aussi !
@ Fleur du Soleil : Merci pour le travail et je suis heureuse que ce billet te plaise ! Le livre se lit très vite et très bien ...
@ Alwenn : L'ensemble est vraiment à découvrir et à faire lire, parce que Calamity Jane se révèle telle qu'elle devait réellement être, une personne sensible et très généreuse ! Et ce recueil permet de s'en faire une image plus positive. Je suis heureuse de te revoir parmi nous ...
Ah oui, une correspondance qui doit être intéressante.
@ Lilibook : C'est une correspondance qui permet de mieux connaître Calamity Jane et sous un angle plus personnel et plus vrai, je pense ...
Un joli billet pour un livre qui nous rappelle qu'il n'est aps toujours facile de tracer son chemin en faisant fi des conventions.
@ Constance : C'est tout à fait le ton de ce recueil ! Une femme qui a voulu vivre comme elle en avait envie, mais qui a dû affronter le regard de la société de son époque et qui ne lui a rien épargné ... Une belle rencontre, dans tous les cas.
Je pense que ça doit être un texte très touchant ! Noté !
@ Choco : C'est effectivement un texte très touchant et surtout émouvant parce qu'elle parle de l'amour qu'elle porte à sa fille, malgré la séparation ! C'est une tout autre Calamity Jane que celle que l'on a l'habitude de nous présenter dans les films ou dans certains ouvrages, certainement plus proche de la réalité ... Une belle lecture épistolaire qui m'a bouleversée !
Comme quoi, de tous temps, le jugement sur les apparences et selon les préjugés est complètement erroné.
Merci pour cette lecture que tu nous présentes avec sensibilité et clarté.
@ Sybilline : C'est évident, et pourtant notre société continue de juger sur les apparences et les préjugés qui ont la vie dure ! Comme quoi, cela ne date d'aujourd'hui ... Merci pour le compliment ;-D
Bonjour Nanne, ces lettres pourrait permettre de réaliser un beau western tragique. Je me rappelle que quand ces lettres sont parues, on en a beaucoup parlé. C'est un témoignage important sur cette époque. Bonne fin d'après-midi.
@ Dasola : Il est évident que ce recueil de lettres pourrait être l'occasion d'un beau western autour de la vraie Calamity Jane ! Surtout quand on est fan de cinéma ... En lisant ce tout petit recueil, on prend conscience des préjugés négatifs que l'on peut avoir sur ces personnages connus. Et c'est un témoignage important, parce que Calamity Jane raconte son quotidien qui est très éloigné de ce qui a été souvent raconté par d'autres. Un très émouvant livre à lire !
Tu me donnes envie de me plonger dans ces lettres et de découvrir cette femme hors du commun. Il y a aussi un très beau roman graphique sur elle mais je ne me souviens plus des références. Il faudra que je regarde!
@ Chiffonnette : Ce court recueil de lettres est très émouvant et mérite que l'on s'y arrête. Je reconnais avoir découvert une tout autre personne que celle que j'imaginais ! Si tu as les références de ce roman graphique, je les veux bien pour continuer ma découverte que cette femme exceptionnelle ...
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