18 novembre 2009

SEMAINE SANGLANTE

  • Sept jours pour mourir - Ingrid Black - Livre de Poche n°37266

Il y a des jours comme ça, où tout tourne à l'envers. Un temps pourri qui s'abat sur Dublin, qui s'insinue partout et vous met le moral en berne, peut parfois vous gâcher l'existence. Quand, en plus, vous n'avez pas d'atomes particulièrement crochus avec cette ville spectrale délavée par les abats d'eau de décembre, vous ne pouvez que la maudire et la vouer aux gémonies. Saxon, pur produit made in America et fière de l'être, essaie tant bien que mal d'oublier sa présence à Dublin en feuilletant le Boston Herald dans un petit café du port. Tout allait plutôt mal en cette matinée hivernale jusqu'à l'arrivée de Nick Elliot, minable pigiste au Post de Dublin. Ces deux-là se détestent cordialement depuis une affaire criminelle sordide qui avait fait la une des journaux - dont le Post de Dublin - relative à une série de meurtres sur des prostituées de la capitale irlandaise. Depuis cette date, Elliot et Saxon sortent leurs ergots dès qu'ils s'aperçoivent. Seulement, Elliot a besoin des compétences de Saxon concernant ce dossier vieux de sept ans sur lequel elle avait enquêté. "Fagan s'était fait arrêter sept ans plus tôt, soupçonné du meurtre de cinq prostituées dublinoises au cours des douze mois précédents. La première à avoir été retrouvée était Julie Feeney, vingt-quatre ans, étranglée et gisant à même le sol près du Grand Canal, à moins de deux kilomètres de l'endroit où nous nous trouvions maintenant. Un mois plus tard, dans un cimetière des environs, ce fut le tour de Sylvia Judge, dix-neuf ans, une étudiante en histoire d'University College qui faisait des extras pour une agence d'escort girls. Après Sylvia vint Tara Cox, deux mois plus tard. Là encore, il y avait eu strangulation, mais le décès était attribué aux coups de couteau qu'elle avait reçus, selon l'hypothèse de la police, en luttant contre son agresseur. Après un répit de six mois, Liana Cassidy et Maddy Holt furent assassinées en l'espace de deux semaines. Aucune des deux n'avait plus de vingt-cinq ans, et on les avait découvertes dans des circonstances rigoureusement semblables".

Ed Fagan, tout le monde savait qu'il n'avait plus donné signe de vie depuis sept ans. Il avait disparu dans la nature, évanoui, évaporé. Enfin, il n'avait plus fait parler de lui depuis son dernier meurtre. Et voilà qu'il refaisait surface par la grâce de Nick Elliot en recherche d'informations à sensation à donner en pâture à ses lecteurs, sous la forme d'élucubrations délirantes envoyées au Post et annonçant une prochaine série de cinq meurtres. A l'issue de l'entrevue avec Elliot, c'est une journée définitivement contrariée qui s'annonce pour Saxon, parce qu'elle seule sait
que Fagan est bel et bien mort. C'est elle qui l'a tué en état de légitime défense. Personne n'est censé connaître l'information. Et ce fou mystique, qui a décidé de prendre la relève de Fagan dans sa quête biblique contre les prostituées de Dublin, commencera sa macabre besogne par une certaine Mary Lynch.

Il a bien prévenu dans son message à Elliot qu'il y aurait une victime par jour pendant cinq jours. "C'était curieux que je me sente aussi exclue. Par le passé, je m'étais trouvée bien des fois sur des scènes comme celle-ci, à examiner les morts et les corps brisés. C'était toujours la même chose, ce même calme dans les opérations, qui me semblait dissimuler un hurlement intérieur. Les lieux qui avaient abrité la terreur et la souffrance avaient beau recouvrer une certaine paix, ils ne parvenaient jamais à s'affranchir complètement du passé. Le mal s'y attachait et finissait par les corrompre, si bien qu'ils devenaient à nouveau le théâtre d'événements atroces. L'horreur a le pouvoir de créer le premier maillon d'une chaîne qui peut se dérouler à l'infini si on ne la brise pas". Pour Saxon, le défi est de taille. Elle ne peut révéler la vérité sur la mort de Fagan alors que tout le monde est persuadé qu'il est revenu après ces années de silence, mais doit tout faire pour trouver qui a décidé de marcher sur ses traces. Commence alors, pour la police de Dublin et pour Saxon, une course contre la montre pour éviter de plonger la capitale irlandaise dans la psychose d'il y a sept ans.

Lire "Sept jours pour mourir" c'est s'immerger dans l'univers des profilers et des serial killers. Mais résumer ce thriller de Ingrid Black à cela serait certainement réducteur. Bien évidemment, il s'agit d'un tueur en série, pervers, obsessionnel compulsif, qui recherche ses victimes - toutes féminines - parmi les prostituées de Dublin. Persuadé de détenir la bonne parole, il laisse des messages à connotations bibliques auprès des corps suppliciés comme pour rappeler une certaine affaire, survenue quelques années auparavant. C'est Saxon, le personnage principal, qui doit collaborer discrètement avec la Police Métropolitaine de Dublin dans cette délicate enquête où les liens entre passé et présent sont souvent enchevêtrés, intriqués. Saxon, atypique et énigmatique, ex-agent du FBI reconvertie en romancière, fume le cigare, déteste Dublin et ses paysages détrempés, a pour petite amie le commissaire principal Grace Fitzgerald et pour ennemi juré Nick Elliot, journaliste raté dont le seul et unique exploit est d'avoir écrit un roman à sensation sur Ed Fagan. On pourrait s'arrêter là et dire que "Sept jours pour mourir" est un roman policier correct, malgré quelques longueurs propres à tous premiers romans. Mais il va bien au-delà
de cela. Dès le départ, il mêle et entremêle meurtres perpétrés par Ed Fagan sept ans plus tôt, série de crimes commis les uns après les autres pendant sept jours et assassinats jamais totalement élucidés. Dès les premiers homicides, le lecteur est égaré dans la multitude des fausses pistes qui se coupent et se recoupent. Impossible, dès lors, de savoir jusqu'au bout qui est le présumé coupable, parce que tous les protagonistes peuvent l'être au fur et à mesure de cette lecture. Jusqu'au bout, le lecteur est tenu en haleine par le suspense qui se dégage d'une écriture nerveuse, saccadée, percutante, comme Saxon. Ajouter à cela un fond d'humour souvent noir et décalé, subtil, et on obtient un mélange qui donne - au bout du compte - un bon premier thriller.

Merci à BOB et au éditions du Livre de Poche pour cette découverte ... décoiffante !

Quelques avis, dont celui de Deliregirl, Un coin de blog, Mango ... D'autres, peut-être ?! Merci de vous faire connaître par un commentaire.





321 - 1 = 320 livres à dévorer malgré ma fatigue et une baisse de moral !

6 commentaires:

Marie a dit…

Encore un super polar à lire ?... Le nombre d'auteurs dans le domaine du suspense qui me tentent devient astronomique !

Cynthia a dit…

Je l'ai reçu de Mango et ton avis ne fait qu'attiser ma curiosité, vivement que je le lise!

Dominique a dit…

je suis en manque de polar, mes dernières lectures n'étaient pas concluantes alors je cherche une série sympa, ed fagan et dublin pourquoi pas, surtout en édition de poche

Nanne a dit…

@ Marie : C'est un genre qui se développe avec plus ou moins de réussite ! Celui-ci est un bon roman malgré quelques longueurs ... On cherche tout au long de la lecture le coupable, et le résultat est plutôt inattendu !

@ Cynthia : Si tu aimes les policiers où le lecteur se perd en conjectures et hypothèses, alors tu devrais passer un bon moment ...

@ Dominique : Trouver un bon policier n'est pas chose simple ! Celui-ci n'est pas mal avec beaucoup de personnages secondaires et un labyrinthe d'hypothèses dans lequel le lecteur se perd ...

La liseuse a dit…

Une histoire qui nous balade bien d'après ce que tu dis. J'aime être surprise dans mes lectures et aussi dans mes certitudes. Merci pour cette découverte.

Nanne a dit…

@ Lætitia : Si tu aimes être promenée tout au long de cette série de meurtres dans un Dublin plus vrai que nature, tu vas certainement aimer ce roman ! Même s'il est de facture classique, son originalité réside dans la multitude des solutions offertes aux lecteurs ... Et la fin est pour le moins surprenante !