- Mémoires d'une dame de cour dans la Cité Interdite - JIN Yi (Picquier Poche)
He Rong Er est entrée à l'âge de treize ans comme dame de cour de l'impératrice douairière Cixi. Elle passera sa vie à servir cette impératrice énigmatique derrière les murs "rouges et violets" de l'antique Cité Interdite. Offerte en cadeau à un eunuque à dix-huit ans, He Rong Er finira sa vie comme modeste femme de ménage à la chute de l'empire. C'est de cette façon que l'auteur, alors jeune étudiant en histoire, fera la connaissance de cette dame de cour indiscrète, ne sachant ni lire, ni écrire, mais à la langue bien pendue et aux souvenirs vivaces et très fournis. Grâce à cette honorable vieille dame, le lecteur peut ainsi découvrir le quotidien, l'intimité et les détails de cette vie interdite au public qui se cachaient derrière les hauts murs de cette cité mystérieuse et séculaire.
La tradition de la cour impériale voulait que chaque dame de cour soit d'origine mandchou. De même, les eunuques ne devaient être que des Han, vrais chinois. Ces dames avaient une vie réglée comme un métronome, avec des codes et des règles ancestraux. La coquetterie n'était pas d'usage. Bien au contraire, la sobriété et la simplicité prévalaient. Tout excès était répréhensible. A chaque saison, toutes recevaient quatre ensembles en soie réalisés sur mesure, vert pour la belle saison, violet pour l'automne et l'hiver. "Pour nous faire belles et nous distinguer les unes des autres, nous jouions sur nos revers de cols, nos ourlets de manchettes, nos bas de jambes de pantalon, nos chaussures aux empeignes brodées. Mais nous devions malgré tout rester très limitées dans notre coquetterie".
Être dame de cour imposait des règles de bienséance. Elles ne pouvaient pas rire aux éclats. Mais elles ne devaient pas montrer leur tristesse, non plus. Le sourire était de rigueur, quelle que soit la situation. La coutume était telle qu'elle allait jusqu'à imposer une position pour dormir, dépendant des croyances, tabous et superstitions nombreux dans la société chinoise. En cas de transgression à ce code, elles étaient sévèrement punies. Ayant un statut inférieur à celui des eunuques, les dames de cour n'apprenaient ni à lire, ni à écrire. Par contre, elles savaient coudre, broder, tricoter et tisser. Et lorsqu'elles quittaient le palais, vers l'âge de vingt-cinq ans, elles ne se trouvaient pas démunies et pouvaient se reconvertir.
En raison de son habileté et de son dévouement à l'impératrice Cixi, He Rong Er a reçu l'immense honneur de la servir pour fumer le narguilé. Ce qui était vu comme une chance et une gloire pour une dame de cour, pouvait aussi très vite devenir un enfer. La moindre faute commise entraînait des mesures de rétorsion sévères pour elle, sa famille et sa "tante", tout à la fois chaperon et ancienne dame de cour reconvertie. "Vous aurez affaire au dieu du feu. Si par mégarde, vous laissiez tomber sur le corps de l'impératrice douairière la moindre étincelle, votre tête ne vous appartiendrez plus. Si vous laissiez tomber la moindre étincelle sur le sol, votre famille même sera mise en cause".
La vie du personnel de cour est avant tout régit par le quotidien de l'impératrice Cixi, convertie au bouddhisme et superstitieuse, croyait aux rites chamaniques mandchous. Élégante et raffinée, elle passait en moyenne six heures par jour pour se faire belle avec des produits de beauté qu'elle se fabriquait. Détestant les parfums artificiels, les eunuques avaient imaginé de remplir des pots de fruits offerts par les provinces du Sud. Tous les palais exhalaient de senteurs naturelles les plus subtiles et les plus délicats. "Ainsi, en toutes saisons, le palais entier embaumait de parfums exquis et rafraîchissants. En été, l'arôme délicieux traversait les rideaux de bambou et flottait longtemps sous les toits de la longue galerie. Nous respirions profondément, et les effluves pénétrants de ces fruits exotiques nous envahissaient d'une sensation savoureuse, unique. En hiver, une odeur agréable, légèrement sucrée, mêlée à une chaleur chatouillante, caressait le visage, et tout le corps s'imprégnait d'une douceur languissante. C'était la saveur du palais des Beautés. Une saveur secrète".
Du lever au coucher de l'impératrice douairière, tout était orchestré avec maestria dans les moindres détails. La nuit, une dame de cour était spécialement chargée de surveiller la qualité du sommeil de l'impératrice, de s'assurer que tout se passait pour le mieux car - au matin - elle était interrogée par les médecins de la cour qui établissaient un bulletin de santé. Dans ce palais où tout ce qui la concernait était chroniqué, répertorié, un sujet était pourtant tabou : ses plats préférés. Personne, pas même ses cuisiniers personnels ne devaient percer ce mystère, de crainte d'être tués immédiatement. Mais le plus frustrant, est qu'une loi millénaire imposait de ne servir que trois cuillerées d'un même plat !
Outre le cérémonial pesant des repas, des célébrations et des commémorations des défunts, des dieux, des bons et des mauvais esprits, il y avait la coutume des pieds bandés. Contrairement aux chinoises, les mandchoues ne se bandaient pas les pieds. Ils étaient enserrés dans des étoffes et - dès l'enfance - les fillettes apprenaient à marcher bien droit avec les pieds comprimés dans ces tissus. Les pieds, par pudeur, ne pouvaient être que cachés. Aucun eunuque, même parmi les plus proches de l'impératrice, ne pouvait les apercevoir. Cela aurait été sacrilège et licencieux.
"Mémoires d'une dame de cour dans la cité interdite" de JIN Yi nous invite à une visite exceptionnelle, celle de la Cité Interdite au temps des empereurs. Avec He Rong Er comme guide, nous apprenons toutes les manies, les superstitions, les exigences des empereurs et les contraintes imposés au personnel de la cour et aux eunuques. Tout - ou presque - nous est divulgué de la part d'une personne pour qui le silence était de rigueur dans son emploi auprès de l'impératrice Cixi.
Sur Hérodote, un article sur cette impératrice équivoque.
La tradition de la cour impériale voulait que chaque dame de cour soit d'origine mandchou. De même, les eunuques ne devaient être que des Han, vrais chinois. Ces dames avaient une vie réglée comme un métronome, avec des codes et des règles ancestraux. La coquetterie n'était pas d'usage. Bien au contraire, la sobriété et la simplicité prévalaient. Tout excès était répréhensible. A chaque saison, toutes recevaient quatre ensembles en soie réalisés sur mesure, vert pour la belle saison, violet pour l'automne et l'hiver. "Pour nous faire belles et nous distinguer les unes des autres, nous jouions sur nos revers de cols, nos ourlets de manchettes, nos bas de jambes de pantalon, nos chaussures aux empeignes brodées. Mais nous devions malgré tout rester très limitées dans notre coquetterie".
Être dame de cour imposait des règles de bienséance. Elles ne pouvaient pas rire aux éclats. Mais elles ne devaient pas montrer leur tristesse, non plus. Le sourire était de rigueur, quelle que soit la situation. La coutume était telle qu'elle allait jusqu'à imposer une position pour dormir, dépendant des croyances, tabous et superstitions nombreux dans la société chinoise. En cas de transgression à ce code, elles étaient sévèrement punies. Ayant un statut inférieur à celui des eunuques, les dames de cour n'apprenaient ni à lire, ni à écrire. Par contre, elles savaient coudre, broder, tricoter et tisser. Et lorsqu'elles quittaient le palais, vers l'âge de vingt-cinq ans, elles ne se trouvaient pas démunies et pouvaient se reconvertir.
En raison de son habileté et de son dévouement à l'impératrice Cixi, He Rong Er a reçu l'immense honneur de la servir pour fumer le narguilé. Ce qui était vu comme une chance et une gloire pour une dame de cour, pouvait aussi très vite devenir un enfer. La moindre faute commise entraînait des mesures de rétorsion sévères pour elle, sa famille et sa "tante", tout à la fois chaperon et ancienne dame de cour reconvertie. "Vous aurez affaire au dieu du feu. Si par mégarde, vous laissiez tomber sur le corps de l'impératrice douairière la moindre étincelle, votre tête ne vous appartiendrez plus. Si vous laissiez tomber la moindre étincelle sur le sol, votre famille même sera mise en cause".
La vie du personnel de cour est avant tout régit par le quotidien de l'impératrice Cixi, convertie au bouddhisme et superstitieuse, croyait aux rites chamaniques mandchous. Élégante et raffinée, elle passait en moyenne six heures par jour pour se faire belle avec des produits de beauté qu'elle se fabriquait. Détestant les parfums artificiels, les eunuques avaient imaginé de remplir des pots de fruits offerts par les provinces du Sud. Tous les palais exhalaient de senteurs naturelles les plus subtiles et les plus délicats. "Ainsi, en toutes saisons, le palais entier embaumait de parfums exquis et rafraîchissants. En été, l'arôme délicieux traversait les rideaux de bambou et flottait longtemps sous les toits de la longue galerie. Nous respirions profondément, et les effluves pénétrants de ces fruits exotiques nous envahissaient d'une sensation savoureuse, unique. En hiver, une odeur agréable, légèrement sucrée, mêlée à une chaleur chatouillante, caressait le visage, et tout le corps s'imprégnait d'une douceur languissante. C'était la saveur du palais des Beautés. Une saveur secrète".
Du lever au coucher de l'impératrice douairière, tout était orchestré avec maestria dans les moindres détails. La nuit, une dame de cour était spécialement chargée de surveiller la qualité du sommeil de l'impératrice, de s'assurer que tout se passait pour le mieux car - au matin - elle était interrogée par les médecins de la cour qui établissaient un bulletin de santé. Dans ce palais où tout ce qui la concernait était chroniqué, répertorié, un sujet était pourtant tabou : ses plats préférés. Personne, pas même ses cuisiniers personnels ne devaient percer ce mystère, de crainte d'être tués immédiatement. Mais le plus frustrant, est qu'une loi millénaire imposait de ne servir que trois cuillerées d'un même plat !
Outre le cérémonial pesant des repas, des célébrations et des commémorations des défunts, des dieux, des bons et des mauvais esprits, il y avait la coutume des pieds bandés. Contrairement aux chinoises, les mandchoues ne se bandaient pas les pieds. Ils étaient enserrés dans des étoffes et - dès l'enfance - les fillettes apprenaient à marcher bien droit avec les pieds comprimés dans ces tissus. Les pieds, par pudeur, ne pouvaient être que cachés. Aucun eunuque, même parmi les plus proches de l'impératrice, ne pouvait les apercevoir. Cela aurait été sacrilège et licencieux.
"Mémoires d'une dame de cour dans la cité interdite" de JIN Yi nous invite à une visite exceptionnelle, celle de la Cité Interdite au temps des empereurs. Avec He Rong Er comme guide, nous apprenons toutes les manies, les superstitions, les exigences des empereurs et les contraintes imposés au personnel de la cour et aux eunuques. Tout - ou presque - nous est divulgué de la part d'une personne pour qui le silence était de rigueur dans son emploi auprès de l'impératrice Cixi.
Sur Hérodote, un article sur cette impératrice équivoque.
15 commentaires:
Que de codes et de contraintes à cette époque !
En tout cas c livre a l'air bien intéressant, documenté et fiable.
Quel enfer et quelle angoisse ce devait être de vivre en cette cour!
Ce livre a l'air passionnant!
@ Manu : C'était au début du 20ème Siècle !! Et ces codes existaient depuis des siècles et étaient toujours en vigueur ...
@ Keisha : C'est effectivement très fiable pour qui s'intéresse à la vie dans la Cité Interdite. C'est un des rares livres qui abordent ce sujet ...
@ Sybilline : Ce livre est très intéressant à lire pour comprendre le poids des règlements et des contraintes sur chaque personnel de cour ...
Coucou Nanne, le livre doit être passionnant en effet !
En tous cas, les photos que tu utilises pour illustrer ton article sont superbes.
Gros bisous et très bon dimanche,
j'aime beaucoup les livres qui nous permettent de connaître un pan de l'histoire.Je note
@ Muad': Ce livre est très instructif pour qui s'intéresse à la Chine impériale et à la vie de la cour dans la cité interdite ...J'essaie de rendre mes articles le plus vivant possible. heureuse que cela te plaise ;-D
@ Gambadou : C'est un très bon livre pour qui à envie d'apprendre un bout de la vie, surtout dans la cité interdite ... J'espère qu'il te plaira !
Ce livre a l'air particulièrement intéressant, Picquier est vraiment un éditeur incontournable quand on est attiré par l'orient
bravo pour ce blog
Un véritable enfer que cette cité interdite....une cage dorée comme Versailles?
Toujours est-il que ce récit est très instructif!
@ Dominique : Picquier est l'éditeur spécialisé dans la littérature asiatique et de qualité ... Merci pour le compliment !
@ Katell : Je crois que c'était même pire qu'à Versailles, parce que le personnel ne pouvait jamais sortir sous peine d'être condamné à mort ! Et ce récit est très instructif et aide à mieux comprendre la mentalité chinoise ...
Je le lorgne depuis longtemps sans sauter le pas! Me voilà convaincue! Je trouve fascinant ce genre de récit. Il y a une part de subjectivité, mais c'est un moyen vivant et passionnant de découvrir des choses!
@ Chiffonnette : C'est complètement subjectif, mais c'est vraiment passionnant d'apprendre le quotidien d'un lieu aussi mythique que la Cité Interdite. C'est une vraie mine d'informations !
J'ai adoré ce livre !
Très intéressant, rempli de détails, on s'imagine sans peine la vie de cour...
@ Anonyme : C'est le genre de documentaire qui passionnera tous les lecteurs qui veulent mieux connaître les arcanes du pouvoir dans le palais de Pékin ! J'ai, moi aussi, adoré cet ouvrage pour ses détails et son réalisme ... J'ai aussi "Mémoires d'une eunuque à la cour impériale" qu'il faut que je lise !
Bonjour Nanne
Je viens de regarder "Le Dernier Empereur" de Bernardo Bertolucci; quelle vie extraordinaire! Je suis donc d'autant plus intéressée par le livre que tu nous présentes d'une manière toujours attrayante, pour pouvoir pénétrer dans ce milieu si fascinant.
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